Etats d’âmes: La rémission, et après ?

Avoir un cancer à 32 ans… Arrêter sa vie actuelle pour ne plus rien faire que se concentrer sur la guérison à un âge où on imagine à peine commencer à profiter de notre vie d’adulte…

C’est à la fois un choc et une remise profonde en question.
Comme évoqué dans certains autres articles, dès le début, je ne me suis jamais posée la question du « pourquoi moi ». J’ai pris l’info et suis passée direct au « comment je règle cela au plus vite » avec surtout une date de fin. Date de fin somme toute théorique dans ce genre de domaine mais il m’en fallait une pour avoir un but, une échéance.

On m’a annoncé le cancer un vendredi 13 (octobre) et j’ai fait ma dernière chimio un vendredi 13 (avril). La boucle est bouclée. Le professeur L m’avait dit 6 mois de traitement, il ne pouvait tomber plus juste ! (En dehors bien sûr du traitement dit « d’entretien » avec l’avastin).

Après plusieurs mois de traitement, de douleurs, de questionnement sur sa santé pour ensuite être en rémission, comment gérer la suite ?

Dès le début, je m’inquiétais assez peu sur la guérison du cancer. J’ai été extrêmement bien prise en charge à tout point de vue et les médecins étaient très confiants post-opération puisque le chirurgien à pu retirer l’ensemble des cellules cancéreuses durant celle-ci.
Le choc a surtout été l’infertilité: Celui de ne pas pouvoir donner la vie même au delà de celui de transmettre mes gênes (impossibilité pour ma part de récupérer des ovocytes, les deux ovaires étant atteints). Un rêve d’ados, de jeune femme qui part en fumé. Difficile de faire son deuil. On est beaucoup plus « sensible » à des films comme « Il a déjà tes yeux » après cela.

Depuis toujours, je prenais mes erreurs, mes mauvaises expériences de façon positive in fine en me disant que j’ai vécu ces moments pour que la suite soit meilleure, que je devienne une meilleure personne… Si j’ai fait l’erreur de réagir « ainsi » dans une situation donnée, c’est que cela m’a fait évoluer et que cela était nécessaire.

« Jamais un échec, toujours une leçon »

Pendant mes longs mois d’arrêt, je suis tombée un matin sur l’émission « C’est au programme » sur France 2. Ils interviewaient Patricia Darré, médium. Elle venait de sortir un nouveau livre sur ses expériences de médium dans différents endroits en France, Il y a quelqu’un dans la maison. J’ai toujours été intriguée par cela. L’idée que l’âme ne meurt pas et continue ailleurs, ou pas pour ces « fantômes » restés coincés ici me plaisait. J’ai commandé son livre puis j’ai voulu en savoir plus en commandant ses premiers opus.
Dans son premier opus, Un souffle vers l’éternité, elle raconte ses discussions avec ces âmes, aujourd’hui passées à autre chose après leurs vies sur terre.
D’après ces récits, nous serions tous « programmés ». Nous décidons avant de naître, de la vie que nous aurons, des difficultés que nous rencontrerons qui nous aideront à élever notre âme. Tout est donc écrit. C’est pour cela, selon elle, que des certaines voyantes sont capables de nous prédire l’avenir que nous aurons. Elles ont accès à cette « programmation ». Le « comment » dépend de nos vies ici. Nos anges gardiens nous aident parfois à nous remettre sur le chemin.
Mais alors, pourquoi décider de se faire souffrir avec par exemple la maladie ? Elle répond dans son deuxième opus, Les lumières de l’invisible, où elle explique qu’avant d’arriver sur terre, il n’y a pas de notion de souffrance physique puisque nous n’existons pas en tant que matière. Nous ne pouvons donc prévoir cette notion, nous prévoyons que ce que cela peut apporter à notre âme et son évolution.

C’est une question de croyance très personnelle mais j’aime beaucoup cette vision. J’y adhérais un peu avant sans le savoir en me disant que si je vivais certaines choses, même très difficiles, c’est que je devais en apprendre quelque chose, que cela devait m’amener ailleurs. Une sorte de « destin ».

Je ne crois pas au hasard dans la vie. Par exemple, avant d’être diagnostiquée, je cherchais à changer d’entreprise. J’ai passé des entretiens pour trois entreprises différentes. J’ai toujours été dans les derniers candidats. Une N+2 du poste visé m’a même dit: « Tu es la personne que je veux dans mon équipe, tu es ce qu’il y a de mieux ! » et pourtant aucune des trois entreprises n’a donné suite pour des raisons parfois très étranges ! « C’est la RH qui n’a pas accroché », RH que je n’avais pourtant jamais rencontré ! « Vous étiez pendant longtemps notre préférée mais au final on prend quelqu’un d’autre »… De fausses excuses à chaque fois…
Avec cette vision de « programmation » je vois les choses différemment. Cela ne pouvait pas fonctionner puisque 2 mois après j’allais être diagnostiquée et donc devoir partir plusieurs mois en arrêt maladie, ce qui n’est pas possible en période d’essai… J’aurai certainement perdu ma place dans ces nouveaux postes et devoir m’inscrire au chômage, une source de stress non nécessaire quand on est malade.

Même chose sur la prise en charge médicale. Après avoir vu ma gynéco qui voulait absolument que je passe une échographie avant mon départ en vacances mais me laissant me débrouiller pour trouver un rdv, je suis allée en cours de danse. Je connais assez peu mes copines de danse mais ce soir là, je ne sais pas pourquoi, j’en ai parlé à l’une d’entre elle qui m’a orienté vers un médecin chirurgien gynéco qui m’a ensuite trouvé un rdv chez le Professeur L, à l’HEGP, un des services les plus reconnu pour le traitement de ce cancer (ils recevront d’ailleurs en février 2018 un prix européen pour l’excellence de leur prise en charge chirurgicale sur ce cancer). Qu’est ce qui m’a poussé à lui en parler ce soir là? Parler à une personne que je connaissais à peine? J’aime penser qu’un de mes anges gardiens n’étaient pas loin.

Donc, s’il on suit cette logique d’évolution de notre âme, qu’est ce que cette expérience doit m’apporter ? Qu’est ce que ce cancer doit m’apprendre ?
Beaucoup d’autres femmes ayant vécue un cancer disent que le cancer a permis de les révéler. La question est donc, qu’est ce que cela va m’apporter à titre personnel?

Qu’est ce que l’infertilité, si dure à accepter, doit m’apprendre ? Je ne mettais pas poser la question avant mais aujourd’hui, je conçois qu’on puisse être mère sans avoir donné la vie. Je ne renonce absolument pas à mon rêve de devenir maman.

Qu’est ce que cela doit m’apprendre sur ma vie d’avant ?

Cela remet en cause pas mal des choix fait et la vision que j’avais auparavant. Je n’étais déjà plus forcément bien dans mon entreprise, cela m’a ouvert les yeux ! J’étais anxieuses, je n’avais plus envie de sortir, mes amis me trouvaient tristes… Mon boulot prenait 90% de mon temps et ma vie pour au final …. et bien plus grand chose car après plusieurs mois d’absence, au vu des changement opérant actuellement, mon poste n’existe plus… Si j’avais dû y retourner pendant mes traitements, je n’aurai plus de place alors que pendant 4 ans, j’ai donné toute mon énergie et mon enthousiasme pour construire quelque chose qui a pu être détruit en quelques mois d’absence.
Cela remet les idées en place pour la suite.
Je me disais avant que j’avais le temps de fonder une famille. La petite phrase d’un voisin de chimio m’a renvoyé cela à la figure; « Vous avez eu le temps d’avoir des enfants » (voir post sur les petites phrases assassines). Et bien naturellement, non… Je me focalisais sur ma carrière et sur mon poste en laissant de côté la partie personnelle car « j’ai le temps, je suis jeune ».
Lors d’une discussion avec mon père lors de la fin des traitements, il m’a dit « la priorité maintenant c’est de t’acheter un appartement ». Dans ma tête, presque instantanément, je me suis dis « non c’est de me trouver un mec ! ». C’est venu naturellement. Je ne crois pas que ce genre de chose me serait arrivé sans cette épreuve. Les priorités ont changé.
On se révèle pour certaines choses également. Dans la catégorie plus « futile », les chaussures à paillettes que je n’ai pas osé prendre en août 2017, avant le diagnostic, je les ai acheté sur un coup de tête pendant mes chimios et c’est certainement les chaussures que j’ai le plus portés les semaines suivantes… Envie de changer de vêtement, de style… Faire le vide également chez soi…Ne plus se prendre la tête sur « mais qu’est ce que vont penser les gens »… Juste faire ce dont on a envie. Dire non quand on a pas envie d’aller à une soirée ou de sortir… etc.

Faire de la place dans son cerveau pour sa vie perso. Voilà le challenge, tout en se trouvant un travail où je puisse m’épanouir, trouver le temps de prendre soin de soi, de faire des rencontres, de trouver un partenaire de vie pour la « nouvelle moi » même si le passage où il faudrait expliquer pourquoi il y a une cicatrice de 33 cm du diaphragme au pubis va certainement être délicat à l’avenir…
Une trace d’un combat dont je peux être fière car je l’ai gagné mais qui demandera de trouver les mots justes pour l’expliquer.

Affaire à suivre donc…

2 commentaires sur “Etats d’âmes: La rémission, et après ?”

  1. Bonjour,
    Je suis admirative de votre parcours.
    Moi aussi je combats ce cancer de toutes mes forces et j’espère pouvoir comme vous apporter mon témoignage car on en voit pas assez.
    Je vous souhaite beaucoup de bonheur et je suis sûre que vous serez une maman géniale.
    À bientôt
    Nathalie

    1. Bonjour Nathalie,

      Merci beaucoup pour votre message. Je suis contente que ce blog soit bien reçu. S’il peut aider d’autres malades, j’en serai la première ravie et fière.
      Je vous envoie plein de force pour ce combat ! On en sortira que plus forte 🙂

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