Un petit tour sur le blog que j’ai délaissé depuis plusieurs mois pour mon autre vie, la fameuse vie « normale ».
La vie a repris, celle du métro/boulot/dodo que beaucoup critiquent par sa banalité mais qu’on est bien heureux de retrouver après des mois de tempête.
Enfin « métro »… quand on est parisien, le métro est plus un concept depuis plusieurs semaines avec la grève !
Petit retour car on fête cette semaine les 2 ans de l’opération, la fameuse, la laparotomie. C’est un cap important pour moi. Même si j’ai été diagnostiquée en octobre, puis effectué 3 chimios avant l’opération, c’est réellement l’opération qui m’a fait comprendre que j’étais malade et dans quoi j’étais embarquée. Je n’avais ou ne voulais pas prendre conscience que j’étais malade avant.
Un souvenir que je garde sur cette période est le nouvel an. 22 jours avant l’opération, 3 jours après la dernière chimio du premier cycle. On le fête chez ma meilleure amie avec un couple d’ami qui ne savaient pas que j’avais un cancer. Mes globules blancs étaient au plus bas. Le mot d’ordre était de faire très attention et pas de contact style faire la bise. L’amie venant d’arriver veut me faire la bise et je refuse. Elle me dit: « Tu n’es pas malade! » et très spontanément, je réponds un grand NON. C’est ma meilleure amie qui rectifie derrière en disant: euh si en fait !
C’est très représentatif. N’ayant « que » eu des problèmes digestifs (le cancer de l’ovaire est silencieux), je ne me sentais avant pas malade. Là c’était la chimio qui me rendait malade donc non, je n’étais pas malade.
Cela inquiétait d’ailleurs mes proches. Je gérais très bien tout ça mais ils avaient l’impression que j’étais dans le déni. Je pense que j’avais conscience de ce qui se passait mais mon cerveau était en mode « automatique » et donc à aucun moment je ne me suis vraiment sentie malade à cette période. J’avais été invitée à l’hôpital à un atelier Belle et Bien (cf article à ce sujet dans le blog). J’étais mal à l’aise de repartir avec tous ces produits. Je ne me sentais pas légitime de les prendre.
Donc l’opération fut un grand, très grand cap. Je suis arrivée pas super sereine mais surtout car j’avais peur de souffrir au réveil (j’avais eu pas mal de douleur pour la cœlioscopie alors là, vu ce que c’était j’étais plutôt paniquée). Un article détaillé sur l’opération est dispo dans le blog également.
L’annonce du diagnostic était celui où je disais au revoir à la possibilité de porter un enfant un jour, un rêve de gamine. L’opération, celui de la prise de conscience complète de la maladie.
C’est d’ailleurs contradictoire comme sensation car s’il y a un moment où j’étais cliniquement en rémission (et donc sortie d’affaire) c’était le post opératoire, ce moment qui a été le plus difficile.
C’est pourtant l’opération qui a commencé mon vrai changement. On nous dit que la maladie va nous changer profondément. Je ne comprenais pas cette notion. Je m’en rends compte dans les écrits que j’ai fait avant l’opération. On m’avait conseillé d’écrire pour extérioriser mais aussi avoir la possibilité de me rappeler. J’ai relu mes textes il y a quelques jours et je me suis rendue compte à quel point j’ai changé et ce changement a commencé à s’opérer à l’opération.
J’étais choquée de lire qu’en décembre, en pleine chimio, à quelques jours de l’opération, je râlais contre les nouveaux objectifs de mon entreprise, des objectifs que je trouvais inatteignables. Si j’avais su que je n’y retournerai jamais et surtout ce qui se passerait quelques jours plus tard…
Il y a une photo qui est très représentative de ce moment. Ce moment où cela a basculé.
Cette photo est celle que j’ai prise le dimanche 21 janvier 2018, quand j’ai éteint la lumière de ma chambre, la veille de mon opération. Les rideaux étaient descendus mais j’avais comme un faisceau lumineux qui venait et partait. J’ai ouvert les volet et découvert cela: La tour Eiffel me faisait coucou de loin.
C’était le « juste avant ». Celui où je ne savais pas vraiment ce qui allait se passer et encore moins à quel point tout cela allait me changer. Elle est importante. Je la regarde souvent. Elle est d’ailleurs sur le compte Instagram pour « l’anniversaire » des un an de l’opération.
Pendant tous les traitements et en « fraîche » rémission, j’ai toujours eu du mal avec le mot « grave ».
« C’est grave ce que vous avez eu ». J’y arrive toujours pas. Je n’arrive pas avec cette notion de gravité car à aucun moment je me suis dit que je ne m’en sortirai pas.
Je garderai en tête toute ma vie la phrase de la psychologue « maintenant vous savez ce qui est grave ».
On m’a aussi dit qu’il fallait aussi que j’accepte que ça l’était.
Aujourd’hui, je ne veux pas non plus l’accepter. Je pense que l’accepter impliquerait que si cela revient, je sois dans un état de panique extrême que je n’ai pas connu lors de cette épreuve car Grave = Mort. Mon cerveau continue de me protéger et je l’en remercie.
Ces changements justement… Parlons-en.
Les côtés ultra positifs:
Niveau boulot notamment! Je me prends beaucoup moins la tête. Actuellement je suis complètement surbookée en gérant l’absence et l’attente de recrutement de nouvelles personnes. OK mais je ne finirai plus à 21h pour combler cela. Certaines choses du coup ne se font pas, où il y a des ratés… Je déteste ça mais aujourd’hui je me dis que c’est comme ça. Tant pis. A 18h30 je suis partie et profite de ma vie. C’est un gros changement pour moi où 98% de ma vie d’avant tournait autour de mon boulot. Une de mes collègues m’a d’ailleurs dit: « tu dis souvent quand on stress qu’il faut se détendre, qu’on sauve pas des vies »… et comment !!
C’est le gros point positif du changement.
Les côtés plutôt négatifs (oui il ne faut pas se mentir):
La bonne montée de stress en recevant ses résultats de prise de sang vous connaissez ? Je fais partie de cette population de personne où les marqueurs sanguins sont significatifs. C’est à la fois très pratique car pas besoin d’attendre un scanner pour savoir si tout va bien (et c’est pas l’examen le plus sympa en terme de rayon). En gros, les miens étaient à 292 lors du diagnostic et ils ont commencé à baisser juste après l’opération pour finir quelques mois après entre 10 et 15. J’ai toujours, quand je reçois le mail de résultat une montée de stress. Je ne regarde d’ailleurs que ce résultat en bas de page. Cela m’a d’ailleurs joué des tours et pas plus tard que la semaine dernière:
Prise de sang de suivi comme tous les trois mois. Je vais direct regarder ce taux et il est à 23. Ok il est toujours en dessous des 35 recommandé mais j’étais depuis plus de 18 mois entre 10 et 15. Je préviens ma famille que c’est normal mais dans ma tête je passe un mauvais weekend (la prise de sang était le vendredi pour mon rdv de suivi le lundi après midi). En fait, je flippe… J’ai eu un cancer lent, peut-être qu’il revient, doucement mais surement… Je me pose donc 10 milles questions durant le weekend. Le dimanche soir je retourne quand même regarder mes résultats et regarde à gauche de ce taux de 23 et me rends compte que c’est pas le CA125 mais le CA15-3 ! Pour les non-connaisseurs, c’est le marqueur du cancer du sein !!! Ils s’étaient trompés ! Pas de panique, il faut qu’il soit en dessous de 31 celui là donc non je n’ai pas de cancer du sein ! Mais surtout je me suis angoissée pour rien !!
Je retourne au labo lundi matin à la première heure pour refaire mon taux… Je leur dis que franchement c’était pas sérieux. J’insiste pas forcément mais j’aurais dû. Mon seul but là est de calmer mon cerveau et d’avoir mon taux de CA125. Je suis ultra stressée !!
Il me font le taux dans la matinée, résultat à 11h30: CA125 13,7. Il n’a pas bougé. Mais P**** quelle frayeur ! Imaginez mon stress quand au bureau j’ai reçu le mail de résultat le lundi matin… Il n’y avait pas plus de raison de stresser que le vendredi d’avant sauf que là, ils m’ont fait flipper !! J’ai mis quelques minutes à redescendre après sa réception… Le stress des exams…
Un autre point négatif: Je suis en mode protection +++ côté perso. Je n’ai pas de souci à dire que j’ai été malade et encore moins quand je rencontre quelqu’un (je suis célibataire). Mais je suis méfiante. Je reste sur mes gardes. Je ne laisse pas mes émotions biaiser un jugement comme quand j’ai été malade alors que là justement, il faut que les émotions prennent le dessus. J’ai du mal à m’ouvrir. Mais j’y travaille.
Voilà, ne pas écrire pendant plusieurs mois font des articles à rallonge 🙂
Je vais continuer à revenir ici de temps en temps. Pour vous raconter où j’en suis. J’essaie d’avancer dans ma vie perso, rencontrer quelqu’un qui me corresponde, quelqu’un qui fera le chemin d’une GPA ou d’un adoption avec moi (oui je n’ai pas renoncer à devenir maman)…
Je vous raconterai 🙂